Comment faire bouger les lignes et changer de paradigme ?
Votre organisation est-elle plutôt de type hiérarchique et contrôlante ou favorise-elle l'autonomie et la collaboration sur un mode égalitaire ? Quels sont les impacts de ces types d'organisation sur les personnes qui y travaillent.
Je souhaite dans cet article partager mon vécu et proposer des pistes de réflexions pour favoriser le type d'organisation qui m'est cher car il permet de se sentir plus vivant à l'intérieur de celui-ci.
Comment un changement de management a impacté ma vie ?
Je vous partage mon expérience personnelle.

Il y a 20 vingt ans, dans l'asbl où je travaillais, l'organisation était horizontale. Il y avait de petites équipes autogérées qui fonctionnaient avec beaucoup de souplesse et d'autonomie.
Il y avait des incertitudes budgétaires liées au mode de financement mais globalement, je savais pourquoi j'étais engagée. Je mettais mon énergie et mes compétences au services des personnes qui avaient des difficultés pour trouver leur place dans le monde du travail.
Une collègue m'a pris sous son aile pour m'apprendre mon métier et me voilà en train d'expérimenter un processus collectif participatif où chacun.e peut être reconnu.e, apporter son point de vue, échanger, s'entraider. C'était valable pour les personnes qui participaient aux formations mais aussi pour l'équipe.
Des réunions servaient à déposer les difficultés rencontrées pour trouver des solutions bénéficiant de l'expérience et de regard croisés.
Un jour, "mon titre" a changé, je n'étais plus "coordinatrice" mais "manager" avec un "N+1" / et des"N-1". Je faisais dorénavant partie du Middle management.
Je ne me suis pas rendue compte à l'époque de toutes les conséquences de ce changement de perspective. La structure porteuse s'est agrandie suite à des fusions. Les contraintes financières ont augmenté et petit à petit le mode de management a évolué.
En vingt ans, beaucoup de choses ont changé. Pas que là où je travaillais d'ailleurs, un peu partout, les mêmes transformations ont eu lieu.
Moi, qui aimais l'organisation circulaire où chacun.e pouvait de façon équivalente apporter un éclairage spécifique, des compétences pour avancer ensemble et accomplir nos missions, je me retrouvais entre deux échelons d'un organigramme avec de plus en plus d'étages.
Ensuite sont arrivées des procédures pour les achats, pour la réalisation d'entretiens annuels, pour la communication externe...
J'aime la facilité et la légèreté. J'ai moi-même mis en place des outils pour faciliter le travail en équipe. En plus, j'adore créer des supports en vue de rendre moins fastidieuses certaines tâches. J'ai donc utilisé des fichiers Excel pour créer des plannings, pour réaliser des suivis par exemple. Ces outils étaient évolutifs au service du travail à réaliser ensemble. Et si un outil était inefficace, il pouvait être modifié ou abandonné.

Mais lorsque les procédures mises en place sont créées pour toute le monde et semblent impossible à changer même lorsque sur le terrain elles compliquent le travail, cela peut créer des frustrations par manque de fluidité et parfois de cohérence.
Et pourtant, je suis sûre qu'à la base, les intentions sont d'améliorer le travail et de répondre aux contraintes imposées de l'extérieur comme les règles de marché public par exemple.
Ces règles, elles aussi, créées avec l'intention de faire un bon usage des financements public.
Sauf que ces procédures sont des stratégies tragiques car elles ne répondent pas aux besoins auxquels elles sont sensées répondre.
Que d'énergies perdues !
Comment se fait-il que ces modes de fonctionnement continuent malgré tout ?
Je vous propose d'examiner l'une ou l'autre croyance à l'origine de ce modèle d'organisation afin de les interroger.
"Pour être efficace, il faut être rationnel"
Prenez un moment pour voir si vous partagez cette croyance avant de l'examiner ensemble.
Les structures pour fonctionner de manière rationnelle doivent s'organiser et les organigrammes permettent d'organiser le travail avec des responsabilités clairement définies avec au dessus des personnes qui pensent, dirigent et en-dessous des personnes qui exécutent les tâches qui leur sont assignées.
Si je retourne cette croyance, est-ce vraiment efficace et donc rationnel ?
Si non, comment la modifier tout en restant rationnel ?
Une deuxième croyance que je vous invite à explorer concerne la motivation au travail.
"Quand le chat est parti, les souris dansent dit le proverbe " autrement dit si on laisse faire les salarié.es, personne ne va plus travailler.
Il est donc important de les contrôler via des procédures rigoureuses, des pointeuses.
Les experts créent ainsi des tableaux de bord avec des indicateurs de résultats, des procédures pour rendre le travail plus efficace, plus productif, plus mesurable.
Hélas, plus il y a de procédures, plus la motivation des personnes de terrain baisse.
Et si les gens sont mécontents, cela renforce la croyance initiale que les salarié.es ne veulent pas travailler. Et donc, "Heureusement que les procédures sont mises en place !"
Tragique, non ?
Alors comment faire ?
Voici plusieurs pistes.
Tout d'abord, questionner nos croyances sans jugement et sans culpabilité.
Pour ma part, je crois que la majorité des personnes ont envie de s'épanouir au travail, de réaliser des tâches qui ont du sens et adorent voir l'accomplissement de leurs efforts.
Comment c'est pour moi d'entendre cela notamment en tant que responsable ?
Ai-je la crainte de ne pas arriver à atteindre mes objectifs ou de ne pas être à la hauteur des responsabilités qui me sont confiées si j'accorde plus d'autonomie ?
Je crois que les personnes ont plus d'énergie quand elles agissent en suivant leur élan plutôt que par obligation.
Suis-je d’accord avec cela ? Est-ce que je pense que cela risque d'être le chaos ? Est-ce que les choses vont se faire vraiment par élan, n'est-ce pas utopiste vu les contraintes extérieures? Et puis de toute façon, comment faire pour faire bouger les choses au sein de ma structure ?
Ensuite, je crois que nous aspirons tous et toutes à vivre des relations égalitaires, où chacun.e est reconnu comme ayant de la valeur et peut apporter un point de vue intéressant et utile pour comprendre l'ensemble de la situation.
Quelle que soit ma fonction, ai-je confiance en mon opinion ? Suis-je à l'aise pour l'exprimer, pour dire ce qui va et ce qui ne va pas ? Est-ce que je prends ma place au sein de la structure ou y ai-je renoncé ?
Ai-je le courage ou l'envie d’examiner toutes ces questions qui viennent peut-être remettre en question mon identité professionnelle ?
Vous comme moi, nous avons été conditionné.es à penser et à agir d’une certaine manière. Sans doute que cela nous a permis d'accomplir certaines choses. Ceci dit, nous avons le choix, nos croyances sont-elles encore au service de l'organisation ou pas ? Si les personnes motivées sont en train de quitter le navire ou perdent leur motivation, n'est-ce pas un signal à entendre si nous voulons bénéficier des apports du plus grand nombre pour trouver des solutions aux systèmes complexes auxquels nous appartenons ?
Ensuite, reprenons chacun.e notre pouvoir d'agir.
Pouvoir choisir de nous exprimer ou pas, de changer ou pas.
Est-il possible pour moi de dire mes inconforts ? De dire et d'entendre "Non, je ne le ferai pas car cela n'a pas de sens pour moi ou parce que cela complique mon travail inutilement " par exemple sans être fermé.e au dialogue ?
Pour cela, il peut être utile de prendre le temps de me relier à ce qui est important pour moi pour l'exprimer de façon à avoir le plus de chance d'être entendu.e. Si l'autre entend un reproche, c'est foutu, nous n'arriverons pas à nous entendre ni à changer les choses ensemble.
Vous allez me dire que ça fait beaucoup de questions, tout ça !
En plus, ce sont des questions que nous n'avons pas l'habitude de nous poser.
Changer sa manière de voir, de penser et d'agir n'est pas facile mais cela peut être enthousiasmant de retrouver de l'énergie et de la joie au travail.

Je suis sûre qu'une autre organisation de travail est possible, moins coûteuse en terme humain, plus efficace aussi.
Et si nous essayions ? Et si nous examinions ensemble nos aspirations au travail pour avoir plus de chances de nous en approcher ?
Valérie
www.formation-vivance.be